Et si le poète, croyant dire sa nostalgie, tissait au contraire les liens nouveaux – amoureux et littéraires – qui vont permettre la rencontre ? Bassoul la blanche, Soucouta et Mané baobab voyageur : si le poète au lieu du gouffre qui le hante donnait à connaitre des lieux et des visages qu’il nous ferait aimer ?
Car ce sont bien les nuances d’une rencontre – celle de la terre et de l’eau et celle de nos tréfonds – que le peintre Christian Gardair, découvrant les poèmes de son ami Khaled Ezzedine, a lui aussi voulu saisir. De l’ocre au bleu et passant par le noir de l’impossible retour, c’est bien à la rencontre du Saloum et de
son horizon que le peintre, dans le sillage du poète, veut à son tour nous embarquer ! Un poète qui vit en France regarde le Sénégal où il a grandi. Mesurant la distance qui le sépare de son enfance, il croit dire son chagrin. Mais non ! Simple comme la vie simple de l’amandier, son poème au contraire dit le cœur vif d’un pays dont le peintre, ému, veut lui aussi témoigner. Deux voix, finalement un livre : aussi belle qu’elle est fugace et fragile comme elle est éternelle, ici, une formidable tendresse !
Chercheur, médecin dermatologue et poète, Khaled Ezzedine est né au centre du Sénégal. Il a obtenu le prix de la Crypte en 1995 pour Crépuscule d’eau. Loin est son troisième recueil.
Extrait:
Ce matin
Réveillé avec les îles
Ramassant des cailloux
Puis les jetant
Par-dessus le rêve
Et le Saloum
Va sa route
Creuse des sillons
De rencontres et de séparations
Le Saloum
Enclave transitoire
Où je dessine des fenêtres