LA FLEUR QU’ON EMPORTA de Irma Pineda

Dans ce recueil d’une cinquantaine de courts poèmes, Irma Pineda décrit les violences militaires contre les peuples indigènes. Face au silence laissé par les soldats qui ont brisé les siens, elle brandit ses mots à mains nues. Des mots profondément enracinés dans la terre et la mémoire de son peuple qui saignent, pleurent, interpellent, consolent, aiment et tissent contre toute espérance des liens d’humanité.Irma Pineda compose tous ses poèmes dans sa langue natale, le Zapotèque de l’isthme, qu’elle traduit ensuite en espagnol. C’est la poétesse et traductrice Christel Visée qui s’est chargée de la traduction française du recueil.

Extrait :
Tu laadu yana
Pa guendaruzaani’ sti’ ca doohuiini’ ni gúcudu dxiqué
ma nazeca’ beñe
ti qui gu’ya’ guenda nanala’dxi’ laadu
ne qui igaadu nisaxhini dxaba’ ni rundaalu’
Tuunga’ nalu’ cayuninalu’ ne bele riree ruaalu’ ca ?
Zandaca quiñentaalu’ naa
ziaba’
xhisi gabeca’ lii
ziuuru’ binni guiasa gucaalú lii

¿Quiénes somos ahora?
Si el brillo de los hilos que nos vistieron de colores
hoy están cubiertos de fango
para ocultarnos de la mirada del odio
y del veneno que nos lanzas
¿ a quién crees que dañas con tu aliento de fuego ?
Podrás hacer que caiga mi cuerpo
            Yo caeré
pero una cosa te digo
otros más se levantarán para enfrentarte

Qui sommes nous à présent ?
Si les fils brillants qui nous habillèrent de couleurs
sont aujourd’hui couverts de boue
pour nous cacher du regard de la haine
et du venin que tu nous lances
à qui crois-tu nuire de ton haleine de feu ?
Tu pourras faire tomber mon corps
              Moi je tomberai
mais je te le dis
d’autres encore se lèveront pour t’affronter

L’auteur :
Irma Pineda est née en 1974 dans l’État de Oaxaca, au sud-ouest du Mexique. Fille deVíctor Yodo, professeur et défenseur des droits des paysans indigènes « disparu » entreles mains de l’armée en 1978, elle est connue pour son engagement auprès de sonpeuple, les Zapotèques de l’isthme de Tehuantepec, qu’elle a notamment représentés à l’ONU. Toute sa poésie est écrite en deux langues : sa langue maternelle, le zapotèquede l’Isthme ou diidxazá (« langue nuage »), et l’espagnol.

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