Dans la première partie de ce livre, l’auteur mène une enquête. Son objet ? L’œuvre littéraire d’Emmanuel Hocquard. Sa démarche ? Suivre la trace d’un écrivain qui fonda les Éditions Orange Export Ltd, passait aisément les frontières et aimait à la fois la poésie américaine et Tanger. Son dessein ? Prouver que l’écrivain dérobait des formes littéraires pour les transformer (celle de l’élégie ou du roman noir américain, par exemple), tendait à l’effacement des genres et s’intéressait aux processus par lesquels l’écriture poétique consigne notre rapport au monde. La seconde partie fournit des pièces à conviction en offrant un large choix de textes d’Emmanuel Hocquard. Elle donne à lire en particulier les élégies, forme poétique traditionnelle dont l’écrivain renouvela le rythme et la signification.
Extrait :
1. La psychologie ronge la littérature française qui s’en défend
tant bien que mal car, régulièrement, tel ou tel auteur, non sans
véhémence d’ailleurs, fait mine de lui échapper pour ne s’occuper
que de la place des mots dans les espaces et des situations qu’ils
produisent. Le naturalisme, le surréalisme ou le Nouveau Roman
en France ont chaque fois réagi, à leur manière et pour des raisons
différentes, à cette tendance qu’ils n’ont pourtant jamais éradiquée.
Les cibles visées ne sont pas toujours les bonnes, les solutions
apportées pas nécessairement les plus satisfaisantes, mais la
réaction est la même. Éviter la psychologie, ce n’est pas éviter de
parler de soi, c’est s’interdire de justifier ses comportements ou
ceux des autres en les rapportant à des codes ou à des lois supposés
les régir et nous permettre de les expliquer. C’est ainsi que dans
le domaine du roman traditionnel, le petit moteur à deux temps,
introspection/explication, tourne à plein régime.